Je vais aux Etats-Unis dans un peu plus de
deux mois. J’attends ce moment depuis longtemps. Bien longtemps. Trop
longtemps. Mais alors que l’excitation grimpe au fur et à mesure que le jour J
approche, je réalise qu’aller aux Etats-Unis signifie quitter la France. Ca va
de pair, comme la blague avec le carambar. Sauf que la blague est drôle et
participe à l’expérience positive que vous apporte la dégustation du carambar.
Quitter la France n’a davantage que la destination. La France va me manquer. Au
plutôt, Paris va me manquer. Je me rends compte jour après jour que je ne vais plus
pouvoir me promener sur la passerelle Simone de Beauvoir, un livre ou une crêpe
à la main, à contempler les bateaux-mouches passer. Je réalise que je ne vais
plus arpenter la rue de la Huchette avec des amies à chercher le bar qui nous
verra enflammer le dancefloor avec une boisson dans la main. Je réalise que je
ne vais plus pouvoir profiter des sièges doux et agréables des salles de ciné
Mk2. Je ne suis pas un amateur de baguette, mais je réalise que je ne vais plus
pouvoir m’en procurer le matin au réveil. Plus à un euro trente centimes. Je
réalise que je ne vais plus pouvoir prendre des photos de joueurs d’échecs au
jardin du Luxembourg. Je réalise que…
« Some
people are funny. Now that he has what he wants, he thinks he can’t live
without what he won’t have anymore ». Ce n’est pas exactement vrai. Je
vais continuer à vivre, et bien ! L’excitation que me procurera ma
nouvelle ville, ma nouvelle vie, mes nouveaux camarades de classe, mes nouveaux
amis, les nouvelles opportunités qui s’ouvrent à moi, est tellement grande que
ça ira. Je regarde tellement vers l’avant qu’une fois devant je ne tournerai
pas le cou pour regarder derrière. Mais en attendant, devant je ne suis pas. Je
suis sur le bord du trottoir, prêt à traverser la route. Ne vous inquiétez pas,
je la traverse au niveau des clous. Deux
policiers de chaque côté de la route s’assurent que je ne me fasse pas
renverser. Aucun risque. Je suis juste encore sur le trottoir, et tant que j’y
suis, je rumine, je réfléchis. L’autre trottoir de la route est immense et
vaste. Où me mèneront mes pas ?